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Un jour viendra couleur d'orange!
28 avril 2013

Quand Jean-François Copé parrainait un fonds spéculatif (Médiapart)

COPE : avocat d'affaires parrain d'un fonds spéculatif!

 

Le mélange des genres n’effraye décidément pas Jean-François Copé. Déjà critiqué pour sa double casquette de député-avocat d’affaires, le président autoproclamé de l’UMP a également mis son nom au service d’un fonds spéculatif baptisé Lutetia capital, pendant une année environ, à l’époque où il dirigeait le groupe majoritaire à l’Assemblée nationale.

De fin 2009 à fin 2010, d’après nos informations, il a figuré au « comité consultatif » de cette société créée par Fabrice Seiman, son ancien conseiller diplomatique lorsqu'il était ministre du budget, devenu l’une de ses « plumes » au groupe UMP, au milieu d’un aréopage de banquiers et de patrons, tels Yannick Bolloré (Bolloré medias) ou Klaus Schwab (fondateur du Forum économique de Davos). Le métier de Lutetia : parier sur le marché des fusions-acquisitions, si possible en flairant des opérations avant qu’elles ne soient annoncées publiquement.

Jean-François Copé en novembre 2012Jean-François Copé en novembre 2012© Reuters

Ce « comité consultatif » bénévole, à l’allure de carnet mondain, n’a jamais siégé à proprement parler, mais le site internet de Lutetia explique que ses membres sont sollicités « ponctuellement » pour livrer leur « opinion sur l’environnement macroéconomique et la stratégie de l’entreprise ». Chez Jean-François Copé, le conflit d’intérêts est patent. Pourquoi a-t-il accepté de servir ce fonds privé alors qu’il était susceptible, comme chef de file de la majorité à l’Assemblée, de détenir des informations privilégiées sur des sociétés, en particulier à capitaux publics ?

Interrogé une première fois sur le sujet en février dernier, Jean-François Copé avait nié « toute relation » avec Lutetia capital. « Si son nom apparaît, c’est un usage abusif », avait juré son conseiller presse à Mediapart (qui n'a pas rappelé cette fois-ci).

Depuis, nous nous sommes procuré des documents qui montrent que Jean-François Copé faisait très officiellement partie du « comité consultatif » de Lutetia en octobre 2009, lorsque l’entreprise a obtenu son agrément auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Sur des documents internes, son patronyme apparaît même dès la création de la société à l'été 2009. Et pour cause : d’après plusieurs témoignages, sa présence au comité devait permettre de crédibiliser, aux yeux de l’AMF, le projet de Fabrice Seiman et de son associé, trentenaires peu expérimentés (pas certains d’obtenir l’agrément).

Sans ciller, Lutetia capital affirme aujourd’hui à Mediapart que le nom de Jean-François Copé a été « mentionné par erreur dans le comité consultatif, erreur qui a été corrigée depuis deux ans ». Cette « erreur », si l’on comprend bien, aurait été « corrigée » fin 2010… à l’époque où Jean-François Copé est devenu secrétaire général de l’UMP. À l’époque, aussi, où il a renoncé à son contrat d’avocat-conseil au sein du cabinet Gide-Loyrette-Nouel, précisément pour étouffer les critiques sur ses conflits d’intérêts.

Peut-on croire ce scénario d’un Jean-François Copé enrôlé “à l’insu de son plein gré”, jusqu’à la fin de l’année 2010 ? Surtout que le député, loin d’en tenir rigueur à Fabrice Seiman, a continué de l’épauler par la suite : en février 2011, Jean-François Copé participait encore à une opération de promotion de Lutetia capital organisée devant un parterre de clients potentiels dans un salon de l’hôtel Hyatt, où il est venu discourir en « guest star ». Pendant toute cette période, le mélange des genres a été total.

Amendement favorable à Decaux

L’histoire commence précisément en mai 2009, quand Fabrice Seiman crée Lutetia grâce à l’argent de son père (homme d’affaires expatrié en Suisse), en s’associant avec un ancien de la banque Lazard. À l’époque, il travaille au service de Jean-François Copé dans les coulisses du groupe UMP, sans fonction officielle ni salaire, fournissant des notes à son mentor, ici des éléments de discours, là des réponses à une interview, l’accompagnant jusqu’aux États-Unis, lui servant de poisson-pilote dans les milieux du Cac 40. Surtout, il lui organise des déjeuners à l’Assemblée avec des patrons français ou étrangers.

Très vite, Lutetia capital réussit l’exploit d’attirer des dizaines de millions d’euros d’actifs (quelque 90 millions aujourd’hui), malgré le jeune âge de ses fondateurs, et alors même que le fonds principal de l’entreprise affiche de piètres performances – le second spécialisé sur les marchés émergents s’effondrera littéralement en 2011. Par quel miracle ? Les liens étroits tissés entre Fabrice Seiman et Jean-François Copé, au cours de déjeuners communs au Palais-Bourbon, ne seraient-ils pas une clef de compréhension ?

A l'Assemblée, à droite de J.-F. Copé: F. Seiman et son associé

A l'Assemblée, à droite de J.-F. Copé: F. Seiman et son associé© (Optimum, mars 2010)

Prenons un exemple : le 3 juin 2009, dans un salon de la questure, ils sont tous les deux attablés avec Jean-Charles Decaux (JC Decaux), Patrick Ricard (Pernod-Ricard), Claude Béglé (Swisspost) ou encore Patrick Poitrinal (Unibail-Rodamco). Fabrice Seiman a également convié son associé, ainsi que François Bugeon de l’Estaing, ancien ambassadeur de France reconverti dans les affaires, président de Citigroup France, bientôt membre du « comité consultatif » de Lutetia.

Dans ce salon, où l’on reçoit en partie aux frais de l’Assemblée, les intérêts se mêlent, et parfois se fondent. Quelques jours après ce déjeuner, Claude Béglé écrit ainsi à Fabrice Seiman pour lui dire qu’il accepte de rejoindre, dans un même élan, le « Forum France-Singapour » fraîchement créé par Jean-François Copé et le « comité consultatif » de Lutetia capital.

Surtout, la société JC Decaux (numéro un de l’affichage publicitaire en Europe) peut compter plusieurs mois plus tard sur le bras droit de Jean-François Copé au sein du groupe UMP, Christian Jacob, pour faire sauter un article du projet de loi Grenelle II qui la menace directement. Dans le texte initial, deux petites lignes autorisent en effet les élus locaux, quand ils le jugent nécessaire, à prohiber toute « publicité à moins de 100 mètres des écoles maternelles ou primaires ». Pour JC Decaux, cette disposition représente une perte sèche de chiffre d’affaires.

Christian Jacob prend sur lui de rédiger un amendement de suppression, qu’il fait voter le 7 avril par la commission Développement durable qu’il préside, à la va-vite et contre l’avis du gouvernement – « Il s’agit de protéger les enfants de l’agression publicitaire », proteste pourtant le ministre présent.

Pendant ce temps-là, Jean-Charles Decaux discute avec Fabrice Seiman d’un investissement dans Lutetia capital, qui atteindra finalement, d’après nos informations, plusieurs millions d’euros. Sollicités, ni Christian Jacob ni Jean-Charles Decaux n’ont répondu à nos questions. Quant aux gérants de Lutetia, interpellés sur cette chronologie troublante, ils balayent d’un revers de manche : « Lier (notre) présence à un simple déjeuner de juin 2009 à l’Assemblée nationale avec le vote, un an après, d’un amendement technique du Grenelle de l’environnement par d’autres parlementaires n’a juste aucun sens. »

Dès le lancement de Lutetia, en tout cas, Fabrice Seiman a misé sur sa proximité avec Jean-François Copé, et son pouvoir d’influence. Dans une version provisoire de leur dossier d’agrément à l’AMF, que Mediapart s’est procurée, les fondateurs de Lutetia affichaient noir sur blanc leur intention d’utiliser les membres de leur « comité consultatif » comme des agents recruteurs : « Le comité consultatif pourrait faciliter les contacts auprès de (certaines) clientèles », écrivaient-ils, sans fard. Auprès notamment des « sociétés du secteur financier et assurantiel, public, privé et parapublic ».

« Imprudent de ma part »

Outre Jean-François Copé, d’autres membres du « comité consultatif » de Lutetia se sont retrouvés en situation de conflit d’intérêts évident, notamment Grégoire Chertok, banquier d’affaires très prisé (Rothschild & Cie), régulièrement conseil sur des opérations importantes. Pour comprendre, il suffit d’écouter l’interview accordée le 22 juin 2010 par Fabrice Seiman à BFM Business : le gérant de Lutetia a livré ce jour-là sa conviction que GDF Suez était sur le point de s’emparer d’une société britannique, International Power.

Quelques semaines plus tard, le groupe français déclenchait effectivement l’opération, préparée en secret par un banquier-conseil du nom de… Grégoire Chertok. Pour le fonds, cette opération a sans doute généré des profits considérables. Grégoire Chertok aurait-il confié quoi que ce soit à Fabrice Seiman ? (voir les précisions de Grégoire Chertok dans la boîte noire et dans l'onglet Prolonger)

Le gérant de Lutetia répond par la négative, et rappelle que nombre d’analystes financiers avaient, comme lui, anticipé ce rachat. C’est vrai, mais la seule présence de Grégoire Chertok au « comité consultatif » de Lutetia soulève des questions.

Grégoire ChertokGrégoire Chertok© DR

Sollicitée par Mediapart, l’Autorité des marchés financiers refuse de dire si elle a ouvert une enquête ou non sur cet épisode, mais le sujet semble ne pas lui être inconnu. « En trois ans d’existence, Lutetia capital n'a jamais fait l'objet d'une quelconque enquête ni même de la moindre demande d’information de l’AMF », assure pour sa part le fonds.

Interrogé sur cet épisode, Grégoire Chertok annonce à Mediapart qu’il se retire du « comité consultatif » de Lutetia. « Je n’ai évidemment rien dit à Seiman au sujet d’International Power, précise le banquier, par ailleurs conseiller régional francilien (groupe UMP). D’abord parce que je ne le voyais pas, ensuite parce qu’il y a des règles de secret absolu dans notre métier et que toute fuite peut faire échouer une opération. Sans parler des risques de délit d’initiés… Mais cela a été imprudent de ma part d’accepter de figurer dans un tel fonds. Jean-François Copé n’y est plus, il a été retiré. Je vais faire de même, et demander qu’on me retire. » Peut-être Jeffrey Rosen (banque Lazard), membre du « comité consultatif » lui aussi, devrait-il se poser les mêmes questions ?

En réalité, quand on jette un œil sur les comptes de Lutetia capital, les interrogations qui viennent à l’esprit sont multiples. Si l’entreprise a produit 2,15 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2011, elle n’a enregistré que 6 000 euros de résultat net. Ce ne sont pourtant pas les salaires qui pèsent lourd : Fabrice Seiman, par exemple, semble se rémunérer aux environs du Smic et se vante de n’avoir quasiment pas payé d’impôt sur le revenu en 2010 – bien qu’il vive dans un gigantesque appartement du VIIIe arrondissement de Paris.

Une grosse partie du chiffre d’affaires (1,3 million d’euros) s’évapore en fait sous forme de « charges externes », non identifiées. Si Lutetia n’enregistre aucune performance financière, à quoi – ou à qui – sert-elle précisément ?

 

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Commentaires
A
Quand mr coppe et sa femme vont passes des soirees en belgique chez leurs amis milliardaires( voir challenges) avec mr Brice hortefeux... Ils ne reviennent pas les mains vides et investissent dans l immobilier en israel... Sarko y compris mais plus discret dejeuner a londres.... Et tres souvent...
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Un jour viendra couleur d'orange!
  • Si toi aussi tu crois que le peuple uni ne peut être vaincu! Tu vis chaque jour comme s'il était le dernier! Tu te bats pour des jours meilleurs! Tu penses que donner aux autres est mieux que de prendre pour toi! Ce blog est pour toi!
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